Mémoire de Paul St-Pierre à la MRC de Memphrémagog, le 13 avril, 2017.

NH_FLOOD_sm

[Ci-haut : l’emplacement du bâtiment ‘Chez Dame Jacqueline’]

(English follows)

Consultation publique de la MRC de Memphrémagog du 13 avril 2017: Plan de gestion de la zone inondable de North Hatley

La consultation publique à laquelle nous participons ce soir est prématurée, du fait que le document sur lequel elle porte est incomplet, imparfait, parfois inconsistant, flou et tendancieux.

1. Le document est incomplet : Ce document, à quelques détails près, est celui que le Ministère des affaires municipales a déclaré non conforme aux orientations gouvernementales. Pour le rendre conforme, le village de North Hatley doit déposer auprès du Ministère de l’Environnement une demande de certificat d’autorisation donnant le tracé de la décanalisation du ruisseau Kezar. Or, cette demande n’a pas encore été déposée ; le public ne sait donc pas par où passera le ruisseau Kezar ni comment les différentes propriétés de la zone inondable – tant celles du promoteur que les propriétés avoisinantes – seront affectées. Cela a une importance capitale pour la compréhension du Plan de gestion, du fait que la décanalisation fera en sorte qu’environ 2000 m2 de la zone inondable ne sera plus constructible. Cela risque de rendre impossible la construction d’un des bâtiments figurant dans le Plan de gestion. Sans connaître le tracé effectif du ruisseau décanalisé, il est impossible pour le public de donner un avis éclairé sur le Plan de gestion.

2. Le document est imparfait : D’autres l’ont souligné, les calculs eu égard la délimitation des zones d’inondation 0-20, et 20-100 ans doivent être refaits, et cela pour plusieurs raisons – 1. La hauteur attribuée au pont dans le document EXP ne correspond pas aux mesures figurant dans les données du Ministère des transports, ce qui a vraisemblablement un effet sur le calcul des niveaux d’eau. L’effet de cette erreur de calcul de la part d’EXP aurait dû être vérifié avant de consulter le public sur le document ; 2. La délimitation des zones d’inondation dans le document EXP ne correspond pas à la réalité vécue des résidents de la zone ; 3. Le Plan de gestion ne tient pas compte du niveau de l’eau quand la zone est inondée directement du lac, comme en 1994 et dans les années 1920. Ne pas en tenir compte, c’est mettre en péril inutilement les résidents de la zone inondable et leurs biens.

D’autres erreurs dans le document sont reliées à la Politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables. L’article 5.3 établit les critères spécifiques d’acceptabilité d’un plan, notamment en ce qui concerne l’éligibilité d’une zone et le contenu du plan. Malgré ce qui est affirmé dans le document faisant l’objet de la consultation publique ce soir, la zone inondable de North Hatley ne rencontre pas l’exigence d’ « une densité nette plus grande que 5,0 constructions à l’hectare ». Les chiffres donnés dans le Tableau 2 à la page 11 du document sont inexacts, du fait qu’y sont inclues des constructions autres que des constructions principales. Par ailleurs, l’article 5.3 mentionne aussi que « le plan de gestion doit établir un calendrier de mise en œuvre [Je souligne] » ; or, le document ne présente pas de calendrier, mais simplement une liste de tâches à accomplir. Enfin, l’article 5.3 note que « le plan de gestion doit tenir compte des titres de propriété de l’État …  [Je souligne]. » Aucune mention n’est faite, cependant, des servitudes municipales qui existent dans la zone, autres que celles liées aux systèmes d’aqueduc et d’égout – telle, par exemple, celle entre l’Église Inter-foi et l’ancien parc Emily LeBaron. Le document devrait être refait pour rencontrer ces différentes exigences de l’article 5.3 de la Politique de protection.

3. Le document est parfois inconsistant : Deux études sont citées en annexe au Plan de gestion ; elles en constituent le fondement même de son analyse du site. Or, ce deux études parfois se contredisent. Ainsi, l’étude Avizo indique que le terrain du bâtiment connu au village sous le nom de « Chez Dame Jacqueline » (numéro de référence 26) se situe à la fois en dehors de la zone inondable, dans la zone 0-20 ans, et dans la zone 20-100 ans. Des photos confirment, par ailleurs, que le bâtiment a été entouré dans le passé par l’eau venant directement du lac lors d’une inondation. [Voir ci-dessous] Par contre, l’étude EXP place le bâtiment totalement en dehors de la zone inondable. Cette contradiction – et il en existe peut-être d’autres – ne fait que confirmer que les données figurant dans l’étude EXP doivent nécessairement être recalculées avant l’approbation du Plan de gestion ; en fait, elles auraient dû l’être avant de procéder à la consultation publique sur le document.

4. Le document est flou : 1. Aux pages 22 et 23 du Plan de gestion, les nouvelles constructions autorisées sont présentées en termes d’ ‘étages’ (trois étages, quatre étages, cinq étages). Or, la notion d’ ‘étage’ est par sa nature même imprécise et ne correspond pas à la réglementation actuellement en vigueur au village, qui mesure la hauteur des bâtiments en ‘mètres’ ; 2. À la page 27 du Plan de gestion on peut lire, en rapport avec la décanalisation du ruisseau Kezar, qu’ « [u]ne bande d’une largeur de 10 m sera revégétalisée » ; en fait, la largeur de la bande devra être de 10 mètres de chaque côté du ruisseau – une bande d’une largeur supérieure à 20 mètres, donc.

5. Le document est tendancieux : Un plan de gestion constitue un document cadre et est intégré au Schéma d’aménagement. Le schéma d’aménagement est « un document de planification chargé d’énoncer les grandes orientations et grandes affectations de la politique générale de la MRC quant à l’aménagement de son territoire. » (Marc-André LeChasseur, Zonage et urbanisme en droit municipal québécois, p. 255. Je souligne.) Or, ce que présente le Plan de gestion de la zone inondable de North Hatley résulte directement d’une entente de principe particulière entre la municipalité et un promoteur, propriétaire de la quasi-totalité des terrains figurant dans la zone d’inondation. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer l’entente de principe et le Plan de gestion en ce qui concerne le nombre et la hauteur des bâtiments envisagés, le nombre d’unités de logement, ainsi que l’occupation au sol proposée. C’est dire que le Plan de gestion n’a pas été élaboré en fonction de besoins généraux ou de grandes orientations ; il ne constitue pas un cadre général pour le développement du village. Le Plan de gestion présenté ici a été élaboré en fonction d’un développement précis et d’un promoteur particulier. Or, qu’est-ce qui arrive si ce projet ne se réalise pas et un tout autre projet est présenté, éventuellement par un autre promoteur (des maisons de ville, par exemple) ? Puisque le Plan de gestion a été élaboré en fonction d’un projet particulier, dont les détails sont donnés dans le document, est-ce que cela veut dire que seul ce projet serait possible en vertu du Plan de gestion proposé ?

Les directives du Ministère des affaires municipales en matière de consultation publique sont claires – les documents soumis au public doivent être fiables. Or, le Plan de gestion discuté ce soir ne constitue pas un document fiable ; la consultation publique est prématurée.

C’est pour cette raison que je demande que l’on suspende la consultation publique pour la reprendre une fois le Plan de gestion complété et corrigé.

Les opinions exprimées sur ce site Web reflètent celles de leurs auteurs. L’espace est offert à titre de service à la communauté et FANHCA, ses administrateurs et son hébergeur ne peuvent en aucun cas être tenus responsables des opinions qui y sont émises.